Illustration de couverture Chris Brigonne
SOMMAIRE
Histoire du gentilhomme d'Apchon et de sa femme de Roland Villeneuve
Le loup-garou de Laquérie d'Antonin Meyniel
La Révolte des volcans (roman) de Camille Audigier
Le Pied Jadois de Jean-Pierre Fontana
Les prisons d'Emmanuel Jouanne
De l'autre côté de Christine Renard
Conte du coq bleu d'Henri Pourrat
Conte de la grenouillette d'henri Pourrat
La cage de Martine Hermant
Chat sur canapé de Christine Brignon
La légende du pape Gerbert d'Aurillac de Gaston Durif
Conte de Noël de Jean-Luc Marcastel
Rubriques de lectures de Christine Brignon, Jean-Pierre Fontana et Martine Hermant
ÉDITORIAL
Le Massif central n’a pas été avare de ce qu’il est convenu d’appeler les «Grands Hommes », depuis Vercingétorix jusqu’à Georges Pompidou en passant par Sidoine Apollinaire, Michel de L’Hospital, Blaise Pascal, le marquis de La Fayette ou Pierre Teilhard de Chardin. On lui doit aussi, par exemple et entre autres, des fantaisistes (Fernand Raynaud), des dessinateurs (Jacques Faizant), des comédiens (Henri Vidal, Claude Giraud et, plus récemment, Audrey Tautou ou Chantal Lauby), des journalistes (Claire Chazal), des chanteurs (Jean-Louis Murat, et il faudrait mentionner – mais cela remonte si loin – Na de Casteldoza, une trobairitz auvergnate et quelques troubadours comme Peire d'Alvernhe ou encore Pons de Chapteuil,), des compositeurs (André Georges Louis Onslow et Emmanuel Chabrier), des artistes peintres (Victor Fonfreide, Charles Jaffeux, plus récemment encore, Lucien Véchard, Michel Sauret, ou encore mes amis Michel Bassot, Claude-Henri Fournerie et Christophe Vacher), des politiciens éminents (Étienne Clémentel ou Paul Doumer, le premier de nos trois présidents de la République), des militaires (Louis Charles Antoine Desaix dont la statue en bronze du sculpteur Charles-François Lebœuf se dresse fièrement sur la place de Jaude, et aussi de grands résistants comme Émile Coulaudon, le célèbre colonel Gaspard), des hommes d’église (Pierre de Montboissier dit Pierre le Vénérable et surtout Gerbert d’Aurillac, le pape de l’an mil sous le nom de Sylvestre II), des cinéastes (Maurice Pialat et Robert Bresson), et passons sur les innombrables sportifs – cyclistes, rugbymen, athlètes – etc.
Pour ce qui concerne la littérature, Amélie Murat, Janine Le Fauconnier, Jean Anglade, Georges Bataille, Georges Conchon, Jacques Delille, Lucien Gachon, Marie-Aimée Méraville, Arsène Vermenouze et bien d’autres figurent encore dans les rayons des libraires, mais rares sont celles et ceux qui se sont aventurés dans les territoires de l’imaginaire, du fantastique ou de la science-fiction. Une exception notoire toutefois : Valéry Giscard d’Estaing qui publiera en 2010 un roman uchronique La Victoire de la Grande Armée, dans lequel il imagine Napoléon 1er triompher de l'armée russe, puis se retirer pacifiquement du pouvoir.
Les terres du Massif central regorgent pourtant d’histoires étranges, voire diaboliques, propices à titiller l’inspiration. À commencer par celle la Bête, celle du Gévaudan qui fit couler tant de larmes et presque autant d’encre et qui, à ce jour, n’a peut-être pas encore révélé sa véritable identité. En remontant le cours du temps et de l’histoire, les légendes ne manquent guère. Comment ne pas évoquer ces grottes de Jonas, proches de Saint-Pierre-Colamine, qui virent se succéder pendant des millénaires maintes gens et civilisations jusqu’à y abriter, paraît-il, les Templiers lors de la terrible répression entreprise par Philippe le Bel. Leur trésor y aurait été caché. Il y serait toujours enfoui selon certains. Et à propos de trésors disparus, quels anciens cloîtres ou châteaux n’en recèlent pas ? À commencer par le puissant château-fort de Montrognon, dont il ne subsiste plus qu’une tour éventrée, juchée au sommet d’une petite éminence rocailleuse visible depuis Clermont, qui cacherait lui aussi dans ses entrailles un veau d’or dont la recherche en avril 1883 coûta la vie à Auguste Vignon venu forer le sous-sol de la ruine avec son compère Naca, seul rescapé de l’aventure. Et là n’est pas le seul mystère de ce lieu : ainsi les deux “sphinx”, dont on ignore l’origine, qui semblent soutenir ou consolider les restes de l’édifice. Quant à la tour de Montcelet, dernier vestige d’une imposante forteresse, qui domine le village de Vichel, elle abriterait encore les statues en or des douze Césars que fit réaliser Étienne de Letz pour éviter que soit volé l’or dont il avait la garde. Deux tables en or se trouveraient aussi dans les souterrains du château d’Anjony. Et à proximité de Lempdes, en limite des départements du Puy-de-Dôme et de la Haute-Loire, proche de la route dite de Napoléon, un souterrain du château de Léotoing, du moins ce qu’il en reste, recèlerait lui aussi un trésor. Vraies ou fausses ces histoires de trésors cachés ? Qui sait ! D’ailleurs, n’a-t-on pas retrouvé des pièces d’or gallo-romaines à proximité des ruines du château de Montmurat, près d’un caveau dont l’ouverture était encombrée par un monceau de squelettes curieusement assis, victimes de la faim ou de l’asphyxie.
Quelques personnages redoutables sont aussi susceptibles d’enflammer l’imagination des conteurs : Victor Mornac qui terrorisa le sud des Combrailles dans les années 1840-50 ; la comtesse Brayère, terrible ogresse du XIIe siècle qui, pour expier ses crimes, multiplia les dons vers la fin de sa vie et mourut de la lèpre ; le capitaine Merle qui sema la terreur dans le sud de l'Auvergne, le Gévaudan et le Velay durant les Guerres de religion. Et est-ce utile de rappeler les méfaits des aubergistes de Peyrebeille (“l’Auberge Rouge”), en limite de la Haute-Loire et de l’Ardèche, qui inspirèrent conteurs et cinéastes et donnèrent lieu à une chanson interprétée par Yves Montand ?
Quoi qu’il en soit des littérateurs et de leurs préoccupations, Gandahar, qui se définit comme la revue de tous les imaginaires et dont le siège est d’ailleurs discrètement implanté au cœur de la capitale arverne, Gandahar, donc, a songé à réunir en son 26ème numéro des textes de quelques aventurières et aventuriers des territoires des rêves, des enchantements et des lendemains qui déchantent parfois. Le plus illustre d’entre eux n’étonnera personne puisqu’il s’agit d’Henri Pourrat, présent avec deux de ses innombrables et magnifiques contes. Quant aux autres, ils sont le fruit de disparus devenus regrettablement des oubliés des éditeurs et des libraires mais aussi d’auteurs présentement actifs qui se rencontrent ici ou là dans les salons régionaux ou se consacrent aux littératures dites “de grande imagination”.
Bonnes découvertes et bonne lecture.
Jean-Pierre Fontana